À Pampelune, sur les terrains adjacents à la rue actuelle de la Navarreria eut lieu le plus grand massacre de toute l’histoire de la Navarre. En 1274, lorsque Enrique III de Navarre (comte de Champagne et de Brie,vassal, par ce fait, du roi de France) décède, il laisse une fillette de trois à la garde d’une veuve, française elle aussi. À Pampelune, le noyau original de la Navarrerie- situé aux abords de la cathédrale Sainte Marie et peuplé de nobles et de paysans indigènes, avait été progressivement entouré de nouveaux villages et de quartiers peuplés de commerçants français attirés par la dynastie française au pouvoir et par le trafic des pèlerins sur le Chemin de Saint Jacques. Les bourgs de Saint Cernin et de Saint Nicolas subirent un grand essor, dû non seulement à une population dynamique, mais surtout à l’application pour ces gens du très profitable ‘fuero de Jaca’ qui les libérait des impôts que les habitants Navarrais devaient payer à l’évêque. Les différences entre les us et coutumes des francs et des navarrais, les désavantages fiscaux des autochtones face aux immigrants ne firent qu’augmenter les tensions dans un contexte d’ingérences de la part de l’Aragon et de la Castille. La sympathie des habitants navarrais envers les castillans et les aragonais venaient de la promesse des rois Jaime I d’Aragon et Alfonso X de respecter intégralement les us et coutumes dont les officiers français de la dynastie de Champagne ne faisaient aucun cas. Cette ambiance sera le commencement de la Guerre de la Navarrerie.
Devant la possibilité de ce que sa fille puisse être évincée du trône par l’un ou l’autre des puissants rois voisins, la reine veuve- Blanche d’Artois, demanda de l’aide à son cousin le roi Felipe III qui lui offrit de marier son second fils avec la reine (fillette Juana) dès qu’elle en aurait l’âge. Entre temps le roi français aurait un rôle de protecteur du royaume et de la fillette qui serait élevée à la cour de France. Sans consulter les états du royaume Blanche accepta et envoya sa fille à Paris. Les représentants du royaume ne purent que se résigner, mais les habitants de la Navarrerie répondirent en fortifiant leur périmètre et le bourg voisin de San Miguel qui avait épousé leur cause.
En janvier 1276, le nouveau gouverneur français nommé par le roi, le chevalier Beaumarchais (célèbre pour en avoir achevé avec le banditisme dans son pays), vint avec ses troupes prendre son poste. Il commença par essayer de négocier le démantèlement des fortifications, mais les naturels refusèrent, argumentant qu’ils obéissaient aux lois ecclésiastiques et que le roi n’avait aucune juridiction sur eux.
L’affrontement entre les partisans et les détracteurs de la reine-fillette prirent chaque fois plus d’importance donnant naissance à la Guerre de la Navarrerie. Conspirations et affrontements violents se succédèrent jusqu’à ce que le gouverneur demanda l’envoie de renforts. Pour gagner du temps, tandis qu’il réunissait une armée, le roi français envoya plusieurs leaders militaires ainsi que des religieux pour essayer de d’obtenir une paix. Ils arrivèrent à faire douter l’antérieur gouverneur : Pedro Sanchez de Monteagudo qui négocia son changement de veste. Apprenant celà les partisans de l’autre leader militaire des Navarrais, Garcia Almoravide, le firent assassiner, lui et ses partisans. L’évêque de Pampelune profita de la trêve pour s’enfuir en Castille afin de solliciter l’envoi d’une armée. Mais les troupes françaises arrivèrent les premières et mirent en déroute les castillans de Alfonso X. À l’approche des français, les chanoines de la cathédrale sortirent en procession avec l’image de la Vierge Marie essayant de leur fermer le chemin, ils ne reçurent que quolibets et injures.
Face à l’impossibilité d’entrer par les portes, les français prirent d’assaut les édifices annexes de la Navarrerie, utilisant des machines d’assaut que le assiégés détruisaient lors de leurs sorties nocturnes. Fin septembre 1276 il était clair que les navarrais ne pourraient plus résister bien longtemps ce qui fit que quelques uns de leurs dirigeants nobles se mirent d’accord pour fuir de la Navarrerie. Les habitants l’ayant appris, ils bloquèrent les portes pour interdire toute fuite. Le chef Garcia Almoravide et ses hommes de confiance réussirent cependant à passer à et traverser la rivière Arga par le pont de la Magdalena. N’ayant plus personne pour les diriger, les villageois envoyèrent un message au gouverneur pour se rendre, permettant que les assiégeants entrent sans opposition.
Les soldats français mirent la ville à sac, violant les femmes, incendiant les édifices... Tous les habitants qui se réfugièrent dans la cathédrale furent eux aussi assassinés. On arracha même la couverture de métal du tombeau du roi Enrique de Champagne( père de la fillette Juana) car on prit le cuivre pour de l’or. Les habitants prisonniers furent conduits au proche château de Tiebas où ils furent pendus ou empalés. Seule la Cathédrale Santa Maria ne fut pas incendiée dans la Navarrerie. Le bourg annexe de San Michel et le quartier juif furent eux aussi démolis.
Les semaines suivantes, l’armée française soumit toute la Navarre, confisquant les biens de tous les richards qui ne s’étaient pas montrés de parfaits collaborateurs. Le chevalier Garcia Almoravide (l’un des chefs principaux des navarrais) fut capturé et mourut dans une prison française. Tous les emplois de quelque importance furent occupés par des français dans les derniers jours de la guerre de la Navarreria
On laissa passer soixante ans après la Guerre de la Navarrerie avant de permettre de reconstruire sur les terrains arasés. La nouvelle population reçut les mêmes lois de Jaca qui réglementaient les bourgs occupés par les français s’unifiant ainsi juridiquement le statut de la ville de Pampelune réunifiée.