Entouré de vallées imposantes et de routes tranquilles, résiste Búbal, un petit village de pierre qui, semble-t-il, a dû se soumettre à une existence pleine de luttes. Pour des circonstances différentes, face à des ennemis différents, mais toujours sur la même scène. Il a persévéré, comme ses voisins, face aux envahisseurs venus de Gaule, l'ancienne France, qui a donné son nom au fleuve Gállego, si important dans la région. Son histoire parle des moments où il a dû faire face à tous ceux qui voulaient, et ne pouvaient pas, conquérir la vallée du Tena. Une vallée majestueuse, sereine, ancienne comme le monde, qui aujourd'hui, comme elle le peut, lutte contre un autre ennemi redouté : le dépeuplement, le néant et l'abandon.
Cette petite ville a résisté. Búbal, à sa manière et dans sa propre histoire, a tenté de lutter contre l'immensité des Pyrénées, l’abandon, un lac de barrage et même les inondations. Búbal a été abandonné à la fin des années 60, mais cela fait aussi partie de son histoire ancienne. Peu à peu, il a repris vie. Búbal est un autre de ces villages qui ont réussi à ressusciter, remplis d'espoir et de confiance en une nouvelle ère.
Comme Granadilla et Umbralejo, il a été intégré en 1987 au Programme de récupération et d'utilisation éducative des villages abandonnés, connu simplement sous le nom de PRUEPA. Ces beaux espaces, autrefois habités, sont maintenant utilisés dans le cadre d'un projet éducatif impliquant des jeunes de toute l'Espagne. Géré depuis une décennie par le gouvernement de l'Aragon, Búbal peut se vanter d'être l'un des meilleurs environnements pour apprendre sur la nature, la coexistence et la récupération culturelle.
L'histoire de Búbal est similaire à celle de Granadilla en Estrémadure. Ses habitants ont dû laisser derrière eux leurs maisons, leurs vies, les liens qu'ils avaient créés entre eux. La Confédération hydrographique de l'Èbre a exproprié la ville. Son objectif : construire le lac de barrage de Búbal. Bien que ce soit aujourd'hui l'un des paysages les plus impressionnants de notre pays, les eaux de ce lac artificiel ont provoqué le départ de ses habitants. La terre dont ils vivaient auparavant a été inondée et, avec le temps, beaucoup de maisons se sont effondrées. La pierre a fondu avec la nature de la région et pendant vingt ans, il n'y a eu rien d'autre que le silence glacial des montagnes.
La reconstruction du village a commencé au milieu des années 1980, lorsque Búbal a été l'un des élus du programme PRUEPA. À l'époque, ils n'étaient pas encore pleinement conscients qu'un jour des centaines d'enfants viendraient profiter de la chaleur de ces nouveaux foyers. Chaque année, depuis trois décennies, des dizaines de lycées de toute l'Espagne ont l'occasion de s'inscrire à ce projet éducatif qui favorise le rapprochement des jeunes avec la vie rurale.
Il n'y a peut-être pas de liens de sang dans les rues de Búbal, mais pendant les jours où le projet est en cours, de vraies familles se créent. C'est ce que disent ceux qui ont eu l'occasion de vivre cette expérience. Une expérience qui a une fois de plus rempli ces rues anciennes de voix, de pas, de cris, d'amour, de joie et d'histoires.
Les traditions des Pyrénées, leur mode de vie et leurs croyances, servent de base aux activités qui enseignent à ces jeunes le respect des environnements ruraux et naturels. Aussi pour se respecter eux-mêmes, pour respecter leurs pairs, leur histoire, notre histoire et l'avenir qu'ils ont devant eux. Les ateliers conçus à cet effet prennent différentes formes, mais le contexte est toujours le même : connaître la vie rurale, la respecter et l'aimer. Pour se connaître soi-même.
Dans le cadre de ce programme, on trouve des ateliers de métiers à tisser, de maçonnerie, d'entretien, de menuiserie ou encore de pâturage, avec la collaboration des habitants de la région. Il y a également diverses excursions dans les villes voisines qui, pour l'instant, n'ont pas pu renaître. Qui sait s'ils finiront par le faire, peut-être même grâce à ces jeunes qui, à un âge crucial, ont compris l'importance et la valeur du monde rural.
Des jeunes qui profitent de leur temps libre et des randonnées où le chemin mène à un hêtre ancien, lieu de rencontre d'anciens sabbats de sorcières. L'origine celtique de ces montagnes permet à une partie de leur culture d'être conditionnée par l'existence de sorcières, de druides et d'autres figures qui n'ont cessé de nous impressionner des siècles plus tard. De nombreux ateliers ont pour but de découvrir et d'apprécier ce qui est aujourd'hui légendaire, mais qui était autrefois habituel.
Ce petit coin de la vallée du Tena est toujours visité par ceux qui l'ont habité autrefois, avec la meilleure intention de partager leurs propres expériences et enseignements. Aussi pour éviter de tomber dans un autre ennemi lié au temps : l'oubli. Búbal, comme Granadilla, n'oublie pas son origine mais, comme tous nos villages ressuscités, il cherche un avenir. Une nouvelle vie.