Il est 10 heures du matin, un dimanche matin ordinaire. C'est ensoleillé. L'accès au parking de Canto Cochino est déjà impossible à cette heure-ci. Mais aucune voiture ne s'arrête de venir. Les habitants de Madrid cherchent à sortir de la ville. La semaine a été dure, comme pour beaucoup, et ils veulent juste trouver dans ce coin du versant sud de la Sierra de Guadarrama, La Pedriza, un endroit où se perdre pendant quelques heures. Se promener, prendre un goûter au milieu du chemin, jouer avec les enfants, laisser les chiens en liberté...
Parmi ces visiteurs occasionnels, ponctuels ou réguliers de La Pedriza, certains seront des grimpeurs. D'autres ne savent peut-être même pas que cette enclave de la municipalité de Manzanares El Real jouit d'une renommée non seulement nationale, mais aussi internationale pour son escalade en dalle, un type d'escalade qui se pratique principalement avec les pieds.
Parmi les attractions de l'Espagne, l'une des plus méconnues est sa grande variété d’endroits pour escalader. Ce fait ne passe pas inaperçu, bien sûr, pour ceux qui pratiquent ce sport. En effet, la triple championne du monde d'escalade Catherine Destivelle (1960, Oran) mentionne dans son livre L'escalade, tu connais? de nombreuses montagnes dans notre pays.
Parmi les zones les plus connues pour cette tâche, citons le massif de Montserrat à Barcelone, dont les voies ont été le point de départ de nombreux pionniers espagnols ; les parois basaltiques des îles Canaries ; la Sierra de Albarracín à Teruel, avec certains des meilleurs blocs du sud de l'Europe ; et, bien sûr, La Pedriza, où la star du spectacle est l'escalade en dalle.
Mais, qu'est-ce que l'escalade en dalle ? Ce sport comporte différentes modalités. Un grimpeur peut choisir d'utiliser des appareils pour l'aider à escalader - escalade artificielle -, d'installer ses propres relais - escalade classique - ou d'utiliser ceux déjà installés sur les parois par d'autres personnes - escalade sportive -. Il existe même un type d'escalade dans lequel l’alpiniste grimpe sans aucune sorte de protection ou d'assurage, appelé escalade intégrale.
L'escalade en dalle est celle dont l'athlète utilise avant tout ses pieds, qui doivent adhérer le plus possible à la roche. Dans ce type d'escalade, les parois ne sont généralement pas complètement verticales, ce qui ne signifie pas qu'elles sont plus faciles, car il n'y a pratiquement pas de prises auxquelles s'accrocher avec les mains. Le grimpeur doit se fier entièrement à ses pieds d'escalade.
Avant que les dinosaures ne marchent sur la Terre, le batholite de La Pedriza dominait déjà ce qui, des millions d'années plus tard, deviendrait la municipalité de Manzanares El Real. En 1992, l'UNESCO l'a déclaré réserve de biosphère et en 2013, il a été inclus dans le parc national de la Sierra de Guadarrama. La Pedriza s'étend sur 3 200 hectares et ses falaises et pics s'étirent le long de son orographie jusqu'à culminer dans le plus haut d'entre eux : Las Torres, à 2 029 mètres d'altitude.
Parmi ces rochers et pics, plus de 2 000 voies d'escalade se frayent un chemin dans le granit. Les dalles, les fissures, les murs, les parois et les blocs - ces derniers étant un autre type d'escalade qui se pratique à basse altitude et sans corde, appelée bouldering - font le bonheur des grimpeurs qui viennent de toute la péninsule, et même du monde, pour se tester sur les secteurs d’El Yelmo, Cancho de los Brezos, El Pájaro, La Tortuga, etc.
Il est 10 heures d'un dimanche matin ordinaire. Une grimpeuse escalade un mur dans le secteur du Cancho de los Brezos. Elle est avec ses compagnons depuis un certain temps. Un oiseau de taille considérable la survole non loin de là. Il peut s'agir d'un aigle royal, d'un milan ou d'une buse. Mais elle est sûre que c'est un vautour. Noir ou fauve. Depuis les hauteurs, elle contemple le paysage de La Pedriza. Certaines chèvres de montagne sautent de rocher en rocher. Pour elles, c'est très facile.